Instant de communion

Le virus l'habite toujours. Sixième jour de fièvre. Sa température fait des montagnes russes. Ce matin, elle ne se sent vraiment pas bien. Elle pleure sans cesse depuis son réveil. Je lui administre une dose d'acétaminophène et elle s'allonge sur moi dans notre lit.

Son petit corps nu et brûlant contre le mien, elle tète doucement. Elle ne tète pas pour se nourrir, elle tète parce qu'elle en a besoin comme on a besoin qu'on nous prenne dans les bras.

La fièvre commence à tomber, son pouce a remplacé le sein, elle me regarde. Son regard, où je lis toute sa vulnérabilité, me rappelle à quel point je suis essentielle pour elle et pas seulement en cet instant où elle est malade. Il me rappelle à quel point il est important qu'elle sâche qu'elle peut compter sur quelqu'un quand elle en a besoin.

Elle lâche son pouce un instant. Son bras se tend vers moi, sa petite main chaude se pose dans mon cou alors que sa bouche murmure un "Maman" tremblotant. Il sonne à mon oreille comme un Merci, merci d'être là, merci pour tout ce que tu as fait pour moi, merci d'être ma Maman.

Son pouce retrouve vite sa cachette. Sans que nos regards ne se lâchent, elle ferme les yeux. Elle les entrouvre une dernière fois juste pour s'assurer que je suis toujours là. Elle me sourit et s'endort.

Ces instants de communion avec mon enfant n'ont pas de prix et je plains sincèrement celles qui clament encore que l'instinct maternel n'existe pas. Il faut croire qu'elles n'ont pas eu la chance de ressentir cet Amour dont la puissance n'a aucun égal.

Je crois profondément en l'existence de cet instinct. C'est lui qui me permet de vivre ma maternité comme un plaisir et non comme une contrainte.

Comme le dit si bien Sylvie Chassin dans la préface du livre de Monique Morin L'instinct maternel apprivoisé : "Les femmes en voulant ressembler aux hommes, ont perdu le contact avec elles-mêmes, et avec la vie, donc avec des instincts vitaux en elles". Il est grand temps que "les femmes reprennent possession de leur corps, de leurs émotions, d'elles-mêmes."